Vie privée: L'habitat des morts
L'architecture funéraire des Romains
Le tumulus est la manifestation grandiose de la sépulture. Le tertre funéraire rappelle dans des proportions beaucoup plus importantes le tas de terre ou de pierres marquant le lieu de la sépulture et empêchant les bêtes sauvages de s'attaquer au corps du défunt.
De nombreux personnages importants furent ensevelis sous des tumulus qui prirent des formes différentes au cours du temps. On connaît par exemple le roi Antiochos 1er de Commagène qui fit bâtir sa sépulture sur le sommet du Nemrut Dag entourée de statues de dieux disposées sur des terrasses. L'histoire a également retenu l'une des plus importantes sépultures comme l'une des sept merveilles du monde antique. Il s'agit du tombeau de Mausole, satrape de Carie, qui laissa même son nom à ce type de sépulture grandiose : le mausolée.
Ailleurs encore, dans les sables de l'Égypte, des architectes et des tailleurs de pierre, sous l'impulsion d'Imhotep, donnèrent naissance aux pyramides qui représentent, comme le tumulus, une montagne symbolique et physique permettant au défunt de s'élever vers les cieux.
À Rome, deux empereurs ont laissé une sépulture monumentale sous forme de tumulus : Auguste et Hadrien.
Le mausolée d'Auguste devait abriter les sépultures de toute la dynastie des julio-claudiens. Son édification débuta dès le début du règne d'Octave Auguste. Il est placé près du champ de Mars. Le monument circulaire de 90 mètres de diamètre pour 42 mètres de hauteur était fait de cercles concentriques dont le centre était la chambre funéraire de l'empereur. Cette base était recouverte d'un tumulus surmonté d'un édifice à colonnade également circulaire semblable à une tholos grecque.
Le mausolée d'Hadrien est situé en bordure du Tibre, face au pont Aelius. Le monument présentait à l'origine une base carrée surmontée d'un niveau supérieur circulaire fait d'un mur orné de demi-colonnes encastrées qui contient le tumulus. Le tout est coiffé d'un édicule carré.
Le mausolée fut bâti sur la rive gauche du Tibre, il rappelle le mausolée d'Auguste situé lui sur la rive droite du Tibre. Il abritait les sépultures de nombreux empereurs de la dynastie des Antonins et de celle des Sévères. C'est aujourd'hui le château Saint-Ange.
Mais les empereurs ne furent pas les seuls à vouloir que leur sépulture rappelle leur mémoire pour l'éternité. En 12 avant J.-C., par exemple, Caius Cestius, tribun de la plèbe, fit construire près de la porte d'Ostie une pyramide qui mesurait près de 37 mètres de hauteur pour 29 mètres de côté à la base. Cette égyptianisation de la sépulture rappelle qu'en 30 avant J.-C., Auguste avait fait de l'Égypte une province romaine.
L'édifice funéraire est bâti à l'identique des pyramides d'Égypte. La structure est pleine hormis la chambre sépulcrale et elle était ornée de peintures.
Au IIIème siècle, la pyramide de Cestius fut intégrée dans la muraille défensive de l'empereur Aurélien.
Mais la plupart du temps, les édifices funéraires étaient disposées le long des voies à l'extérieur des cités. On peut s'en rendre compte le long de la via Appia où s'élèvent encore les sépultures de citoyens romains illustres ou inconnus. On peut également en avoir un aperçu plus précis car mieux conservé à Pompéi en sortant de la ville, par exemple, par la porte d'Herculanum.
Cette disposition avait pour but de rappeler aux vivants le nom et la vie des défunts qui reposaient là et qui apostrophaient souvent les passants par des épitaphes ou des demandes. Certains défunts posaient sous forme de statues, figés pour l'éternité. Car ce qui importaient aux Romains, c'était de continuer à vivre dans le monde des vivants, à tout le moins dans leur souvenir.
Certains monuments funéraires romains renfermaient une chambre sépulcrale destinée à accueillir les libations en l'honneur du défunt, le corps ou les cendres de celui-ci reposant au niveau supérieur ou inférieur de l'édifice. En l'absence de chambre prévue à cet effet, les libations avaient lieu sur un autel placé à l'extérieur de la sépulture. Le cippe, simple colonne basse, était alors muni d'un creux et d'un orifice dans lequel étaient versées les libations ou déposées les offrandes.
Le tombeau peut prendre l'aspect extérieur d'un temple. Certains étaient décorés de bas-reliefs. Ceux-ci pouvaient représenter des scènes symbolisant l'amour pour la personne disparue et la détresse que laisse son absence. D'autres racontent la vie du défunt et notamment son activité professionnelle ou à tout le moins ses magistratures publiques. De ce type est le tombeau de Marcus Vergilius Eurysacès, un très riche boulanger qui a fait bâtir son tombeau près de la porta Maggiore à Rome.
Parfois, de simples pierres tombales ou cippes marquaient le lieu de sépulture.
Les urnes cinéraires étaient entreposées dans des columbaria, espace réunissant des niches identiques mais parfois décorées du portrait du défunt. Le columbarium, parfois appelé pigeonnier en raison de la similitude des emplacements pour les urnes avec les boulins, regroupaient la famille au sens large du terme, y compris les esclaves. Certains columbaria étaient gérés par des collegia, associations de bienfaisance ou professionnelles, ce qui permettait à des romains peu fortunés ou à des esclaves de bénéficier d'une sépulture.
Les urnes pouvaient prendre toutes sortes de formes et notamment celles d'une maison, indiquant que c'est désormais là le lieu de vie du corps du défunt ou de ses cendres.